L’olivier, un symbole de résistance en temps de génocide
"Malgré la mort qui nous entoure chaque jour, nous refusons d’abandonner notre héritage culturel. Transmettre l’amour de l’olivier à nos enfants, c’est leur donner une identité."
A quelques jours du 8 octobre, qui marque deux ans de génocide orchestré par l’Occident en Palestine, je ne pouvais pas faire l’impasse sur ce sujet essentiel. Dans un contexte où les journalistes sont empêché·es de se rendre à Gaza et où celles et ceux qui y vivent et y travaillent sont méthodiquement assassiné·es par l’état colonial d’Israël, il me semble indispensable de soutenir les journalistes qui y sont encore en activité - c’est-à-dire en vie.
J’ai donc invité l’écrivaine Palestinienne Sarah Emad Al-Zaq à nous écrire un article sur l’angle de son choix. A travers ses productions médiatiques et ses postes sur les réseaux sociaux, elle documente au quotidien les réalités des Gazaoui·es : la vie sous les bombes, les déplacements forcés, la famine organisée. Aujourd’hui, elle a décidé de nous parler d’une forme particulière de résistance : la transmission de l’amour des oliviers. Véritable symbole de l’identité nationale palestinienne, l’olivier relie les Palestinien·nes à leur terre. Un enjeu central quand les colons justifient leur entreprise coloniale par l’inexistence du peuple Palestinien et par leur absence de lien avec leur terre. En ce début d’automne, début de la période de cueillette des olives, de moins en moins de Palestinien·nes sont en mesure de prendre soin de leurs oliviers.
Bonne lecture et free Palestine !
Malgré la mort qui nous entoure chaque jour, nous refusons d’abandonner notre héritage culturel. L’olivier demeure notre repère : nous l’enseignons à nos enfants comme on transmet une prière. Cueillir une olive, conserver son huile, partager un repas autour de son goût amer et doux à la fois, ce sont des gestes simples, mais qui deviennent des actes de survie culturelle. Dans les ruines, au milieu des pertes innombrables, nous insistons à garder vivante cette mémoire. Car transmettre l’amour de l’olivier à nos enfants, c’est leur donner plus qu’un fruit : c’est leur donner une identité, une histoire et une promesse de continuité.
Deux ans après le génocide : une récolte volée
Israël n’a laissé à Gaza aucun héritage culturel intact. La ville est éprouvée par les guerres successives. Mais le peuple reste comme l’olivier… des racines solides et des branches qui s’élèvent vers le ciel.
Depuis octobre 2023, Gaza fait face à une destruction sans précédent. Selon l’Organisation des Nations Unies, 78 % des immeubles de la bande de Gaza ont été détruits, partiellement ou totalement, par Israël. L’état colonial cible consciemment les hôpitaux, les écoles et les habitations mais aussi… les oliviers.
Plus de 75 % des oliveraies ont été anéanties par les attaques israéliennes, privant la population de sa principale source de subsistance et d’un patrimoine culturel millénaire. Les terres agricoles, jadis fertiles, sont devenues stériles, et des familles entières se retrouvent sans ressources pour survivre. La récolte des olives, symbole de rassemblement et de transmission, n’est plus qu’un souvenir lointain pour beaucoup, tandis que les rares arbres encore debout témoignent de la résilience d’un peuple déterminé à préserver son héritage malgré le chaos.

Après deux ans de déplacements forcés et de destructions massives, Gaza a perdu bien plus que ses terres : elle a été privée de la joie de la saison des olives et des traditions transmises de génération en génération. La majorité des oliveraies a été anéantie, ne laissant que quelques arbres isolés dans le sud du territoire. L’accès aux terres restantes est presque impossible, car elles restent sous contrôle strict de l’occupation.
Cette destruction ne touche pas seulement les arbres : elle efface un patrimoine vivant. Les rassemblements familiaux, les chants et les repas partagés, qui faisaient la richesse de chaque saison, ont disparu. Pourtant, malgré cette perte immense, les habitants continuent de protéger ce qui subsiste. Chaque olive conservée, chaque geste transmis aux enfants devient un acte de résistance et un symbole d’espoir, témoignant de leur volonté de maintenir vivant le lien avec leur terre et leur culture.
La saison de l’olivier : traditions et résilience
Chaque récolte rappelle aux habitants que, malgré la guerre et la destruction, leurs racines restent solidement ancrées à la terre.
Autrefois, la saison des olives était un moment de joie et de vie. Les familles se rassemblaient dans les oliveraies pour cueillir les fruits à la main, petits et grands ensemble. Les anciens enseignaient aux jeunes comment choisir les meilleures olives et respecter l’arbre, un rituel transmis de génération en génération. Chants, repas partagés et festivités accompagnaient chaque saison, renforçant les liens familiaux et communautaires. L’huile obtenue servait à la cuisine quotidienne et aux occasions spéciales, lien vivant entre culture palestinienne et vie quotidienne.
Aujourd’hui, tout a changé. La majorité des oliveraies est détruite ou non cultivable. Les Palestiniens ne peuvent plus accéder à leurs terres, perdant la possibilité de pratiquer leurs traditions. Les rassemblements familiaux, chants et festivités ont disparu.
Beaucoup n’ont pas cueilli d’olives depuis près de deux ans. Malgré cela, certains habitants continuent de préserver ces traditions. Ils achètent des olives sur les marchés et les conservent ou les préparent directement pour les repas dans leurs tentes délabrées ou leurs maisons endommagées. Ces gestes, bien que difficiles et dans des conditions précaires, ne sont pas seulement une préparation alimentaire, mais un moyen de perpétuer le patrimoine, de transmettre la culture aux générations futures.
La résilience à travers l’olivier
Malgré la guerre, la destruction des terres et la perte des rassemblements traditionnels, l’esprit palestinien reste intact. Chaque saison de récolte, chaque geste, du tri des olives au pressage, témoigne de la résistance et de la continuité culturelle. L’olivier devient ainsi un symbole vivant : il raconte l’histoire d’un peuple qui refuse d’abandonner sa terre, ses traditions et son héritage.
Chaque olive, chaque goutte d’huile, chaque repas partagé, même dans les circonstances les plus simples, est un acte de mémoire et d’espoir. Comme l’arbre qui repousse, la culture palestinienne renaît, génération après génération, et rappelle que Gaza reste enracinée dans son passé, tout en regardant l’avenir avec détermination.
Texte et illustrations : Sarah Emad Al-Zaq
Pour soutenir Sarah et sa famille, les aider à quitter Gaza et à vivre dignement, tu peux leur faire un don via le lien suivant ❤️🩹
Merci pour ce magnifique texte sur la culture palestinienne !